Il
ne fait aucun doute que parmi toutes les procédures de désinfection
employées la chloration est la méthode la plus utilisée pour traiter
l'eau destinée au bétail.
Cette méthode de désinfection de l'eau d'abreuvement
entraine la production de contaminants chlorés,
qui ont soulevé de nouvelles questions. Ces dernières doivent être
prises en compte dans l'évaluation des problèmes de qualité de l'eau.
Plusieurs composés, appelés sous-produits de désinfection (SPD), se
forment suite à l'interaction des molécules de chlore avec les composés
organiques résiduels naturellement présents dans l'eau, tels que les
acides humiques et fulviques, omniprésents dans la majorité des sources
d'eau.
On compte trois principaux types de SPD dans l'eau d'abreuvement qui
représentent un risque potentiel pour le bétail : (1) les
chlorophénols, (2) les trihalométhanes (THM) et (3) les acides
haloacétiques (AHA). Les chlorophénols apparaissent dans l'eau
d'abreuvement à la suite de la chloration des phénols.
De nombreux effets indésirables ont pu être reliés à la production de
SPD. On a constaté que plusieurs SPD phénoliques générés pendant la
chloration ont été à l'origine de lymphomes, de
leucémies et de
tumeurs hépatiques chez les rats.
Les THM ont un lien direct avec l'accroissement du nombre de
cancers de la vessie
et il se peut qu'ils participent également à l'augmentation du nombre
de cancers rectaux et du colon chez les humains (Mills et coll., 1999).
Les animaux d'élevage ayant une vie productive courte, les risques de
cancer sont fortement limités. Les substances cancérigènes ne
constituent donc généralement pas un problème pour le bétail.
Bien que les caractéristiques cancérigènes des SPD soient susceptibles
de présenter un risque pour la santé du bétail destiné à la
reproduction ou à la production laitière (durée de vie plus longue)
bien plus important que pour les bêtes destinées à l'abattage (durée de
vie plus courte), l'aspect pratique de tels problèmes resterait
relativement négligeable.
D'un autre côté, les effets néfastes chroniques pouvant avoir des
répercussions sur la production des animaux proviennent des effets
néfastes des SPD sur les paramètres de reproduction. Il a été démontré
que l'acide dichloracétique provoque des
altérations de la spermation, ainsi que de la morphologie et de la motilité des spermatozoïdes (Linder et coll., 1997).
D'après Veeramachaneni (2000), on peut établir un lien entre la
présence de SPD dans l'eau et la dégradation des tendances
reproductives observées chez les mâles.
Étant donné que la reproduction des animaux de laboratoire peut être
affectée par la présence de SPD, il peut en être de même pour les
performances de reproduction des animaux d'élevage. Il n'est pas rare
que les producteurs doivent faire face à une
baisse de la fécondité
difficilement explicable. L'éventualité d'un lien entre les SPD et les
problèmes de fécondité mérite donc d'être étudiée avec attention.
Dans des études canadiennes, des concentrations élevées de chlore dans l'eau d'abreuvement d
es vaches ont diminué à la fois leur consommation et leur production. En effet, elles réduisent l'action des micro-organismes du rumen et ralentissent les réactions métaboliques.
Des germes de plus en plus résistants
Par ailleurs,
les germes deviennent de plus en plus résistants à la chloration
car beaucoup de canalisations contiennent désormais un biofilm.
Concrètement, il s'agit d'un complexe de bactéries adhérant entre elles
à une surface via la sécrétion d'une matrice adhésive et protectrice.
Ce biofilm gène la diffusion du chlore et beaucoup de pathologies
échappent au traitement.
En résumé, le chlore appliqué en continu est efficace sur la biomasse
en suspension dans l'eau, mais pas forcément sur les microbes
résistants. Malgré le traitement, ils peuvent être encore nombreux dans
l'eau d'abreuvement.